Explorer le pouvoir du suivi et de l'évaluation (S&E) avec la spécialiste Kandi Shejavali - partie 1

février 22, 2022

Kandi Shejavali, spécialiste du suivi et de l’évaluation, pense que le suivi-évaluation a le pouvoir d’apporter d’énormes transformations au bien-être des gens et de la planète et de nous rapprocher du type de société que nous souhaitons. Vous pensez que c’est une exagération ? Découvrez pourquoi elle est de cet avis – et apprenez sa méthode unique pour déterminer les meilleurs pays où travailler. De plus, restez avec nous pendant que nous explorons les principaux défis et opportunités du suivi-évaluation du point de vue de Kandi.

Pouvez-vous vous présenter rapidement? (qui êtes-vous, quels sont vos loisirs préférés, vos plats favoris ou dîtes-nous toute autre chose que vous aimeriez dire à nos lecteurs)

Bien sûr ! Je m’appelle Kandi, également connue sous le nom de « Dr. Reader » par ma famille et mes amis proches, en raison de ma passion pour les livres (j’étais une vraie livrovore en grandissant et j’ai toujours cette gourmandise !)

En plus de mon obsession pour la lecture, j’aime danser et manger de bons plats. Quelle est ma cuisine préférée ? Tout ce qui est local à l’endroit où je me trouve – plus c’est traditionnel, mieux c’est !

Pour quelle organisation travaillez-vous ?

En tant qu’entrepreneur, je suis l’organisation pour laquelle je travaille (rires) Mon entité commerciale liée au suivi-évaluation s’appelle RM3 Consulting. Mais en fin de compte,c’est plus pour mes clients que je travaille, qu’il s’agisse d’entreprises (qui m’engagent pour des travaux de conseil) ou d’individus (qui bénéficient de mes services de coaching). Pourquoi ? Parce que ce sont pour eux que je me réveille chaque jour pour mieux les comprendre et les servir.

J’adore quand quelqu’un me dit que, grâce à mon soutien, il ou elle est en mesure d’améliorer la gestion efficace de son projet et de maximiser les résultats positifs (ce qui est l’essence même du S&E). De même, lorsque je suis en mesure d’aider un client individuel à mener des activités de suivi et d’évaluation avec plus de clarté, d’efficacité et de facilité, cela me réjouit. C’est donc pour eux que je travaille, mes clients.

Dans quelle(s) région(s) du monde avez-vous travaillé jusqu'à présent ? Où avez-vous le plus aimé travailler ?

J’ai travaillé sur des projets qui ont été mis en œuvre dans presque toutes les régions du monde, de l’Afrique aux Amériques, des Caraïbes à l’Asie et du Pacifique à l’Europe. Je n’ai pas nécessairement eu l’occasion de voyager dans tous les pays de mes projets, mais parmi les pays où j’ai eu la chance de me rendre, il est vraiment, vraiment difficile de dire où j’ai le plus aimé travailler, car chacun est tellement particulier.

Alors, basons notre choix sur mon goût pour la nourriture locale, d’accord ? Sur cette base, voici les trois pays dans lesquels j’aimerais retourner et passer de longues périodes à travailler (et à manger) : le Mozambique, le Népal et le Rwanda. (Piri-piri mozambicain, momos népalais, brochettes rwandaises, mmm, je salive rien qu’à y penser…).

Depuis combien de temps travaillez-vous dans le secteur du suivi et de l'évaluation (S&E) ?

Je ne sais pas si j’appellerais le S&E un « secteur » à proprement parler (plutôt une profession), mais j’ai effectué des travaux de S&E sous une forme ou une autre dans de multiples secteurs pendant au moins une décennie et demie, interrompue lorsque j’ai fait un saut pour travailler dans le commerce international et les contrôles à l’exportation pendant un certain temps.

Qu'est-ce qui vous a incité à faire carrière dans le suivi-évaluation (S&E) ?

J’aimerais pouvoir dire que c’était intentionnel, mais je suis en quelque sorte tombée dans le S&E par accident ! Je n’arrivais pas à décider dans quel secteur je voulais me spécialiser, alors j’ai choisi les politiques publiques et l’économie du secteur public comme domaines d’intérêt pour mon master à New York University, car cela m’a permis d’explorer une grande diversité de secteurs. Mes compétences de base en matière d’analyse des politiques publiques (qui sont un élément du S&E) peuvent être appliquées à tous les secteurs : santé publique, éducation, fiscalité, etc. Le rêve d’une personne indécise !

Et il est vrai qu’au cours de ma carrière, qui a débuté comme stagiaire dans une petite organisation à but non lucratif basée à Manhattan, puis d’abord comme stagiaire avant de devenir consultante aux Nations unies, j’ai appliqué mes compétences en matière de suivi-évaluation à tous les types de secteurs, de l’agriculture au financement de la biodiversité, au pétrole et gaz, à la protection sociale, au tourisme et à bien d’autres encore.

Ce qui m’inspire dans le suivi-évaluation, outre la possibilité de toucher à une grande variété de secteurs, c’est l’immense promesse faite par le S&E de maximiser les résultats positifs d’un projet. Et la beauté, c’est que cela fait du S&E la responsabilité de tous ceux qui travaillent sur un projet, car les efforts de chacun ont une incidence sur les résultats du projet. Cela signifie que l’ensemble de l’équipe de projet doit comprendre comment interagir avec le système de S&E, et pas seulement la personne en charge officiellement du S&E.

Quel a été votre moment le plus heureux et le plus difficile lié à votre travail de S&E ? Le moment le plus heureux :

Quel a été votre moment le plus heureux et le plus difficile lié à votre travail de S&E ? Le moment le plus heureux : lorsque j’ai réalisé que mes collègues opérationnels d’un grand projet de 304,5 millions de dollars pour lequel j’étais directrice du S&E couraient maintenant avec enthousiasme vers moi pour parler de S&E,alors qu’à ma prise de fonction, c’était moi qui devais leur courir après. Cela m’a montré que mes efforts et ceux de mon équipe pour brandir le drapeau du S&E et pour démontrer l’utilité du S&E avaient porté leurs fruits. C’était très gratifiant. Honnêtement, j’aurais pu pleurer de joie.

Moment le plus frustrant ou le plus difficile : avoir dû faciliter la mise en œuvre d’une évaluation imposée par les donateurs, sur laquelle la population concernée n’avait pas été consultée et dont la méthodologie ne correspondait ni au contexte culturel de cette partie du pays ni à l’approche de mise en œuvre du projet.

En fin de compte, les exigences de cette évaluation ont peut-être entravé plutôt qu’aidé la réalisation des résultats positifs du projet – et cela n’a certainement pas été amélioré par le comportement du chef de l’équipe d’évaluation, engagé par le donateur, posant ses pieds sur la table et en s’affalant nonchalamment lors de la première réunion avec les parties prenantes sélectionnées, montrant ainsi à tout le monde son niveau de sensibilité aux autres cultures !

Dans l’ensemble, il s’agit d’un cas classique de S&E qui s’immisce dans la mise en œuvre et l’obtention de résultats – et qui, de surcroît, génère du ressentiment. Ce n’est manifestement pas la bonne façon de faire du S&E, chères.chers lectrices et lecteurs de TolaData.

Quelle est la réaction la plus amusante que vous ayez rencontrée lorsque vous avez dit à quelqu'un que vous travailliez « dans le domaine du suivi-évaluation (S&E) » ?

D’habitude, lorsque je dis que je travaille « dans le domaine du suivi-évaluation » à quelqu’un qui ne travaille pas dans le secteur des organisations à but non lucratif ou du développement international, je m’explique tout de suite parce que je sais qu’il sera perdu si je ne le fais pas. Après avoir écouté l’explication, il s’accroche généralement à ce à quoi il peut s’identifier et, avec un grand soulagement et la fierté d’avoir compris, il dit quelque chose qui finit par être assez réducteur, comme « bah oui, les KPI ! ».

C’est toujours amusant de voir comment ils résument le suivi-évaluation. Je pense que « audit financier » a été l’une des réponses les plus drôles – mais aussi la plus triste ! Peut-être que j’aurais dû améliorer mon explication cette fois-là !

A votre avis, quelles sont les plus grandes opportunités et les plus grands défis du suivi et de l'évaluation (S&E) aujourd'hui ?

Je prends le côté « opportunité » de cette question pour désigner d’abord les plus grandes opportunités présentées parle S&E, d’accord ?

La plus grande opportunité présentée par le S&E est l’énorme potentiel qu’il détient pour nous rapprocher du type de société que nous voulons. Pour moi, c’est ce qu’est le suivi et l’évaluation. Ce ne sont pas les techniques, les outils, les graphiques et les chiffres. Tout cela ne signifie rien si les preuves générées par le système de S&E ne sont pas utilisées pour éclairer la prise de décision afin que les projets soient non seulement orientés de manière à maximiser les résultats escomptés mais, plus largement, afin que les projets soient conçus pour être bénéfiques pour les personnes et la planète à long terme.

Cela est particulièrement pertinent aujourd’hui dans le contexte du changement climatique causé par l’homme et de la perte de biodiversité. Je pense que les jugements de valeur des évaluations portés par les activités de suivi et d’évaluation doivent être formulés dans cette optique. Le S&E doit prendre le relais et «aider à imaginer et à formuler [the type of society we want], puis aider à tracer la voie pour en faire une réalité ».

Cela peut sembler un vœu pieux, mais ce n’est pas une chimère. De nombreuses discussions intéressantes ont lieu sur des sujets connexes, comme on peut l’entendre sur des podcasts tels que celui de GIIN – « Next Normal : Réimaginer le capitalisme pour notre avenir ». L’opportunité est là pour que le S&E joue un rôle extrêmement important dans la transformation de la société pour le meilleur ! Les critères révisés du CAD peuvent même être considérés comme un pas dans cette direction, mais je pense qu’ils sont appliqués trop tard dans le cycle du projet. À mon avis, ils devraient être pris en compte au stade de la planification.

Voilà donc l’opportunité que représente le S&E.

En termes d’opportunités dans le domaine du S&E pour les professionnels, je dirais que le travail de consultante indépendante est énorme. Il y a tellement de possibilités. Je ne compte plus le nombre d’opportunités auxquelles je suis invitée à participer et que je dois refuser ou renvoyer à d’autres personnes.

C’est pourquoi je m’engage à être coach pour les professionnels du S&E et à leur faire profiter de ces opportunités. Ce qui m’intéresse est que ces opportunités soient offertes à des personnes qualifiées, idéalement des personnes qui vivent et travaillent dans ou à proximité des communautés ciblées par le projet en question et qui sont engagées dans une approche de décolonisation du S&E. Je veux dire, pourquoi quelqu’un comme moi devrait-elle être envoyée en avion dans un pays pour faire du S&E alors qu’un professionnel local pourrait avoir l’opportunité de gagner un revenu tout en faisant un bon travail de S&E qui intégrerait plus intuitivement la façon de savoir et de faire des communautés locales dans les activités de S&E ?

Je pense que nous devons vraiment nous engager sur ce que signifie le « développement » et veiller à ce que ces opportunités ne reviennent pas toujours aux mêmes personnes.

Pour en venir au plus grand défi du S&E, c’est en quelque sorte le revers de la médaille de sa capacité à nous rapprocher du type de société que nous voulons, et c’est le même défi auquel sont confrontés d’autres domaines et l’humanité en général : comment amener un niveau de conscience élevé dans notre travail et ainsi susciter un changement transformatif.

Eckhart Tolle a dit « Aucun changement n’est possible sans un changement de conscience », et je suis plutôt d’accord. J’ai commencé à réfléchir à ce à quoi cela ressemblerait dans la pratique du S&E, et j’ai l’intention de l’explorer davantage.

C’est en fait l’autre raison pour laquelle j’ai choisi le Népal comme l’un de mes pays préférés pour travailler. J’ai ressenti un incroyable sentiment de paix pendant mon séjour (il n’y avait pas que les délicieux momos, vous voyez)… le zen dans l’air était presque tangible, et mon âme se sentait vraiment à l’aise. J’adorerais me baigner à nouveau dans cette atmosphère, même si, bien sûr, nous pouvons tous cultiver une telle paix intérieure où que nous soyons.

Et le niveau élevé de conscience que cela représente est, je pense, ce dont le monde a besoin, c’est-à-dire que chacun d’entre nous découvre en lui-même ce niveau de conscience, ceci afin d’être plus efficace pour transformer véritablement nos sociétés pour le meilleur, y compris par le biais de notre travail, incluant bien sûr le travail de suivi-évaluation.

Sur un plan plus pratique (je sais que le sujet de la conscience peut sembler un peu ésotérique pour les cartésiens du S&E (rires)), un autre défi dans le S&E est de savoir comment mesurer les résultats spécifiques d’un projet lorsque les projets fonctionnent généralement dans des systèmes complexes. Les différentes parties de la vie sont intimement liées et les choses ne fonctionnent pas de manière linéaire comme le laisse entendre la théorie du changement (TdC) d’un projet. Les utilisateurs de TdC doivent alors être mis en garde sur ce point et, dans la pratique du S&E, des approches pratiques doivent être adoptées pour estimer de manière crédible – notez que j’ai dit « estimer »; il ne s’agit pas d’une science précise – la contribution particulière d’un projet aux résultats auxquels de multiples autres acteurs peuvent également travailler.

Un autre défi consiste à mesurer ce qui compte. Nous disposons d’un grand nombre de mesures qui sont louées pour leur robustesse dans un sens statistique limité (le PIB, par exemple) et qui sont largement utilisées. Pourtant, elles ne disent pas grand-chose sur la façon dont nous nous portons réellement en tant qu’êtres vivants, en tant que personnes et en tant que nature. Je pense que des mesures telles que le « bonheur national brut » du Bhoutan doivent être utilisées beaucoup plus largement, chaque pays ou communauté établissant ses propres objectifs et prenant des mesures adaptées à son contexte particulier pour atteindre ces objectifs. Imaginez le genre de sociétés que nous pourrions créer ! Nous serions riches d’une façon qui compte vraiment.

Et je suppose qu’un dernier défi est que parfois le S&E est considéré comme un fardeau complexe et onéreux. Je le comprends. Mais ce n’est pas nécessairement le cas. C’est pourquoi je cherche à partager mes compétences en matière de S&E d’une manière simple, mais qui permette au S&E qui en résulte d’être solide.

Nous espérons que vous avez apprécié.e de faire connaissance avec la spécialiste du suivi et de l’évaluation (S&E) Kandi Shejavali et de lire ses réflexions sur sa profession et son parcours dans le domaine du S&E.

Restez à l’écoute pour la deuxième partie de cette interview, qui sera publiée en mars 2022. Kandi partagera ses réflexions sur les tendances émergentes en matière de S&E, les compétences qu’il est utile d’avoir en tant que professionnel du S&E, ses réflexions sur le S&E numérique, ainsi que d’excellents conseils, recommandations et ressources pour les nouveaux venus dans le secteur.

En attendant, vous pouvez vous connecter avec Kandi sur LinkedIn ou lire ses articles de blog sur son site web.

Explore the power of M&E with specialist Kandi Shejavali

Contact:

Kandi Shejavali

LinkedIn | Website

Print Friendly, PDF & Email

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

The TolaBrief Newsletter

A monthly round-up of news and useful links on the digitisation of the sustainable development sector, from the team at TolaData

[sibwp_form id=1]
Mentions de Cookies WordPress par Real Cookie Banner